Les Rohingyas, minorité musulmane du Myanmar, ont toujours subi de nombreuses discriminations au sein même de leur Etat. En août 2017, les dirigeants du Myanmar ont subitement accéléré et intensifié la persécution à l'encontre des Rohingyas. Se produisirent en masse des actes de torture, des meurtres, des massacres, des bébés jetés dans les flammes des maisons décimées, des femmes violées, des hommes mutilés, des enfants abattus à bout portant, par l'armée du Myanmar et ses sympathisants. 740 000 réfugiés ont rejoint le Bangladesh. 600 000 Rohingyas se trouvent encore sur place.
D'aucuns, comme le Canada, ont rapidement dénoncé un génocide à l'encontre des Rohingyas. Pourtant, d'importantes instances comme la Cour Pénale Internationale, les Nations-Unies ou encore Amnesty International parlent plutôt d'un crime contre l'humanité, les conditions pour un génocide n'étant selon eux pas entièrement remplies pour les exactions de 2017. Explications :
La première condition à remplir doit être une attaque visant quatre types de groupes : la nationalité, l'ethnie, la race ou la religion. Et c'est tout. Ce sont les quatre uniques catégories pouvant être visées par un génocide. Par exemple, si l'on vous attaque pour votre appartenance à un groupe politique, cela ne sera jamais qualifié de génocide. Concernant les Rohingyas, cette première condition est remplie car ils sont persécutés sur base de leur appartenance à un groupe ethnique.
La deuxième condition à remplir doit être celle d'une destruction du groupe en question. Peu importe le moyen employé (tuer les hommes, violer ou stériliser les femmes, massacrer les enfants, etc.), tant qu'il s'ensuit une extermination du groupe. L'extermination peut être totale ou en partie, tant qu'elle est assez importante. Concernant les Rohingyas, il n'y a jamais eu de chiffres officiels sur le nombre de décès commis depuis août 2017. Médecins Sans Frontières évoquait la mort de quelques 6700 individus, dont 730 enfants, entre fin août 2017 et fin septembre 2017, dénonçant de suite un chiffre "vraisemblablement sous-estimé". Par ailleurs, les femmes et filles Rohingyas font l'objet de viols systématiques.
La troisième et dernière condition à remplir pour qualifier une situation de génocide n'est autre que celle qui pose généralement le plus de débats, l'enjeu autour duquel tourne souvent les procès pour génocide. Cette condition, c'est celle de l'intention. Il faut vouloir faire disparaître le groupe de la surface de la terre, qu'il ne reste plus un seul de ses membres, et ce même avant de commencer à mettre son plan à exécution. Il est excessivement difficile de prouver cette intention de vouloir annihiler un groupe, qui peut être déterminée par exemple par l'existence d'un plan, d'un langage déshumanisant à l'égard du groupe, d'actes de persécution qui suivent un schéma précis, etc.
Et c'est exactement le manque de preuve à l'égard d'une telle intention qui a conduit à parler de crime contre l'humanité et non de génocide dans le cas des Rohingyas. En effet, l'Etat du Myanmar est accusé de "nettoyage ethnique", à savoir qu'il souhaite expulser les Rohingyas hors de son territoire par tous les moyens possibles - mais pas de vouloir les faire disparaître du monde. Peu importe qu'il existe des Rohingyas, tant que ceux-ci ne se trouvent pas au Myanmar. La question est cependant toujours ouverte au débat et non figée dans le temps, certains estimant au contraire la preuve de l'intention suffisamment établie pour parler de génocide.
Super intéressant ! J'apprends à chaque fois quelque chose de nouveau, merci :)
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